Avancer sur le chemin


(Trouver une cohérence sans oublier qu’elle n’est que notre reflet. L’exploration est toujours intérieure.)

19 SEPT 2024


Avancer sur le chemin


« Nous travaillons le Chi en passant par le corps », cette phrase de Vlady, encore et encore. 
 
Avec cette courte phrase, Vlady nous indique une façon d’avancer sur le chemin, tant pour débuter que pour poursuivre. Notre exploration passe par le concret, le physique, par la normalité de la réalité habituelle. C’est une bonne façon de nous rendre compte que cette réalité, nous ne la connaissons pas si bien que ça. Mais c’est avec elle que nous glisserons dans les découvertes du Chi. 
 
Dans cette phrase de Vlady, je vois aussi l’importance d’un passage, un passage obligé. C’est le temps nécessaire à l’apprentissage de nouvelles données, comme lors d’un changement de pays, de culture, de mentalité. Lorsqu’on découvre un nouvel horizon derrière l’ancien, il y a l’effervescence de la découverte, évidemment, mais c’est aussi le temps de l’effondrement de l’ancien. Ce n’est pas encore l’équilibre de la coexistence de deux mondes. Et c’est longtemps avant qu’il n’y en ait à nouveau qu’un seul.
 
Le temps nécessaire, c’est aussi celui qui découle du fait que je n’impose pas les techniques à mon corps, je ne fais que les lui suggérer. Comme si mon corps était un étranger, un « autre » à qui je m’adresse. Ainsi il peut ne pas accepter immédiatement, il lui faut peut-être un certain temps. Est-ce le corps qui n’est pas prêt ou moi ? Je vois là une nécessaire humilité. Pas facile, alors que dans la culture (populaire) d’aujourd’hui, tout se vaut et que donc la tendance est à la revendication. Pour ma part, je préfère l’enfant qui attend patiemment devant la porte du monastère qui lui reste obstinément fermée. J’aime aussi Vlady adolescent revenant et revenant encore frapper à la porte du « fakir qui revient des Indes » (son premier maître). J’aime l’artiste très doué qui ne se prend pas pour un artiste.
 
Cette phrase de Vlady nous incite également à distinguer les articulations et les rythmes du chemin. D’expérience, je constate combien il est important de respecter les étapes dans l’apprentissage d’un art. Ces étapes montrent la cohésion entre le Chi et le corps. Cette cohérence découle donc directement de l’agencement des techniques ou des postures.
 
C’est pourquoi je crois par exemple que sauter à pieds joints dans le domaine du Chi c’est briser la cohérence, c’est rompre le lien entre le Chi et le corps. En fait, c’est prendre le risque de perdre son corps et avec lui, tout bon sens. Se raccrocher alors aux fadaises ésotériquo-complotico-rocambolesques si courantes en ces temps de AI et de Fake News n’arrangera rien, au contraire ! Bien sûr, un choc qui nous déstabilise est parfois salutaire et nous permet de douter – enfin - de nos croyances. Par contre, observer le passage subtil entre une réalité physiquement palpable et à laquelle nous sommes habitués quotidiennement, à une réalité tout aussi palpable et quotidienne, mais totalement inconnue, s’avère enrichissant, constructif et tout à fait passionnant. Cela évite bien des traumatismes et protège la santé nerveuse et mentale.
 
Et même si la logique et la simplicité de la cohérence ne sont qu’apparences, la progression dans l’apprentissage des techniques de Chi tout comme dans celle des mouvements de Tai Ji Quan, est une belle façon d’aborder la magnificence du phénomène de la Vie. Ce phénomène qui se situe au-delà de tout entendement et qui restera à jamais incompréhensible puisque hors des compétences humaines. 
 
Si « Ne pas mettre la charrue avant les bœufs », ce vieil adage rural, avait le mérite d’être clair, il faut peut-être se méfier de certaines formules actuelles, comme par exemple « progresser à son rythme ». D’une part, c’est oublier que notre perception du rythme découle d’une société vouée à la performance et au rendement, et d’autre part, que cette formule peut aussi inciter à une certaine indolence léthargique. 
 
Il ne faudrait pas oublier qu’avancer sur le chemin ne signifie pas aplanir une progression qui se fait naturellement en dents de scie. Et qu’avoir confiance n’est pas fermer les yeux, mais essayer de les ouvrir. Et qu’enfin, si on est bien guidé sur le chemin, on finit par s’apercevoir que les itinéraires sont nombreux. 
 
Je terminerai par cette constatation inquiétante : comment est-ce possible de ne pas avoir vu, d’être passé à côté sans apercevoir l’évidence ? Malgré nos expériences dans l’enfance, malgré la « petite voix intérieure », malgré toute notre attention et nos recherches ? Il nous aura fallu être guidés pour reconnaître enfin la cohérence entre la vie et le corps ! 
 
Il faut croire que la force de l’éducation est colossale. Et qu’il y a des croyances qui aident à vivre et d’autres qui l’étouffent. Le choix est personnel.
 
 
 
Avec cette petite phrase, Vlady nous indiquait une façon d’avancer sur le chemin, tant pour débuter que pour poursuivre. Pour parler de la cohérence du « poursuivre », il faudra un autre texte. Bientôt, peut-être.




 

 



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L’Art du Chi est un art millénaire. Il est diffusé dans plus de 15 pays par les enseignants de l’École de la Voie intérieure, fondée en 1988 par Vlady Stévanovitch, reconnu l’un des maîtres les plus subtils de l’époque moderne en Occident.

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